Pour la première fois depuis six ans, la Japan Expo investissait le Parc des Expositions de Villepinte sans être accompagné de la Comic Con Paris. Une décision que l'on peut comprendre à un niveau économique mais qui a peut-être des conséquences sur la qualité de la convention dans son ensemble.
L'une des grandes forces de cette association était de voir deux mondes éloignés mais pourtant dôtés de nombreux points communs: s'apprivoiser l'un l'autre. C'était une très belle image que de voir des cosplayeurs déguisés en Luffy s'intéresser aux aventures de Batman et compagnie tandis que ceux qui ne juraient que par les comics découvraient la richesse de la bande dessinée nipponne. Deux mondes s'enrichissaient l'un l'autre pour une exposition assez unique au monde.
Désormais, nous sommes revenus à un festival entièrement dédié à cette BD qui se lit de droite à gauche (on schématise bien sûr, les manhua et global manga étaient aussi de la partie). Et qui dit sujet exclusif, dit aussi manque de diversité. Là où les deux pans de la culture populaire s'apportaient l'un à l'autre, nous faisons face à une convention qui fait la part belle au manga (même si une bonne partie du salon est consacrée aux jeux vidéo) et à la culture japonaise. Ce qui en soit est très bien, mais le public est déjà convaincu et vient ici en terrain connu. Pas beaucoup de découvertes donc, et le festival tend alors à devenir un gigantesque marché qui s'étale de plus en plus.
L'une des observations qui nous a le plus marqué lors de ces cinq jours (c'est long cinq jours, certains de nos amis qui tiennent des stands auraient volontiers sacrifié un jour), c'est la multiplication des stands de goodies. Une multiplication qui n'apporte en soi pas beaucoup de diversité, tous s'acharnant à vendre les mêmes collections encore et encore pour des prix tout de même très semblables. Après avoir croisé pour la vingtième fois les statuettes issues de One Piece ou Dragon Ball, on se demandait si les mangas se limitaient à quelques séries. Surtout que même les stands qui sortent de l'ordinaire ont tendance à se ressembler (nous avons croisé un nombre conséquent de stands qui proposaient des lentilles de contact colorées par exemple). Alors certes, un stand tenu par un marchand est plus intéressant pour l'organisation qu'un artiste, mais il faudrait voir à ne pas transformer ce festival en gigantesque supermarché.
Surtout que la présence de la Comic Con Paris avait l'avantage de proposer des animations différentes. Les artistes déjà étaient bien plus accessibles, avec une Artist Alley en libre accès, ce que n'a pas la Japan Ex', les mangakas (et surtout leurs éditeurs) étant bien plus frileux avec ce genre d'exercice. Puis nous pouvions assister à des diffusions de séries, des batailles de dessins ou même des expositions orientées autour des comics, tout un nouvel univers qui, bien loin d'entrer en conflit avec celui des mangas, apportait une nouvelle perspective. Ici, le show est assuré par les diffusions d'animé (d'ailleurs, nous avons totalement perdu AlexLeCoq le temps de l'avant-première de Sword Art Online II), les éditeurs de jeux vidéos et différentes animations autour de la culture japonaise. Plein de bonnes choses donc, mais peu d'alternatives aussi.
Surtout qu'un public est encore là pour la Comic Con si l'on en juge le nombre de cosplays d'Harley Quinn ou de Kick-Ass. Un public qui se balade dans des halls dont les allées ont pu être agrandies grâce à la disparition de la Comic Con (et ça, c'est vraiment une bonne nouvelle) mais qui se rendra compte aussi en poussant un peu plus loin qu'il y a un immense espace non utilisé, si bien que certaines activités, comme le stand de catch, se retrouvent éloignés de tout et de tous. Reste que la bonne humeur est elle toujours de la partie, avec des fans venus de partout qui se rencontrent et qui partagent une passion commune. Nous aurions juste voulu encore une fois pouvoir entendre cette conversation :
"— Tu connais Sandman ?
— Non...
— Bon je t'explique, mais après tu me dis ce que c'est que ce Sun-Ken Rock.
— Carrément !"
(Les exemples sont interchangeables à l'envie.)