De retour dans toutes les têtes grâce à Netflix et la seconde saison de sa série la plus populaire, Daredevil revient également du côté de Panini Comics, qui nous propose ce mois-ci Daredevil Redemption, une histoire pour le moins originale, qui voit notre héros partir dans le sud des Etats-Unis pour défendre, de jour comme de nuit, un jeune innocent accusé de meurtre.
C'est une forme de lieu commun qui sert de point de départ à cette historie, signée David Hine (Spider-Man Noir), qui commence son intrigue en délocalisant le personnage de Matt Murdock, et par extension, celui de Daredevil. Un procédé narratif assez récurrent du côté des comics, mais aussi à la télévision, qui l'utilisent pour ramener un peu de fraîcheur au contexte.
En l'occurrence, c'est dans son introduction que le récit péche le plus. Le premier chapitre, qui voit Murdock partir à la défense d'un jeune homme et de ses deux amis accusés de meurtre, manque en effet de fluidité, et ses justifications sont toujours assez simplistes. Ce qui n'empêche pas notre avocat diurne et justicier nocturne de se retrouver plongé en plein cœur de la ville de Redemption Valley, en Alabama, où règne la méfiance caractéristique du sud des Etats-Unis.
Dévots parmi les dévots, les habitants de la bourgade ne voient pas d'un très bon œil l'arrivée d'un avocat New-Yorkais et de son alter-ego à l'image diabolique dans leur ville. C'est d'ailleurs tout ce qui fera le sel de cette histoire, dans laquelle le héros brille par sa droiture et son sens aigu - mais douteux - de la justice.
Dans ce milieu rural et paranoïaque, fait de racisme, d'inceste et d'atrocités en tous genres, Daredevil et Matt Murdock deviennent plus que jamais nos repères, et nous offrent l'occasion de nous pencher sur tout un tas de sujets chers à l'histoire du personnage, comme la justice, forcément, mais aussi la foi ou l'altruisme. Extrêment dure, en tous cas bien plus que la moyenne des comic books à base de super-héros, l'histoire développée par Hine ne conviendra toutefois pas à tous les lecteurs.
C'est le cœur accroché qu'on découvre un Daredevil surfant plus que jamais sur son symbolisme satanique et un Matt Murdock très porté sur le fait juridique. Un peu à la manière d'un Brian Michael Bendis, bien que le traitement soit légèrement plus soutenu, David Hine développe ainsi une poignante affaire, qu'on a presque plus de plaisir à suivre dans les tribunaux que dans les ruelles de Redemption.
Grâce à l'indéniable talent de Michael Gaydos (accompagné par un Bill Sienkiewicz très en forme sur les couvertures), sans doute. Le spectre de Bendis n'est décidément pas loin, puisque l'artiste, qui avait travaillé avec lui sur Alias (également disponible chez Panini) s'avère toujours aussi bluffant, avec un trait constant et une iconisation particulièrement réussie - on pense notamment à l'une des premières apparition de Daredevil dans cet album, le temps d'une page pleine magnifique.
Seul petit bémol, la relation du dessinateur à David Hine ne semble pas aussi fructueuse que celle qu'il entretenait avec Bendis, dans le sens où les cadrages et la composition s'avèrent très souvent académiques, et pas toujours dans le bon sens du terme.
Si Daredevil Redemption met un peu de temps à nous faire accepter le déménagement de Daredevil dans un contexe un peu particulier, le décalage finit par opérer au cours de l'album, aussi dur que prenant. A ne pas manquer si vous êtes à le recherche d'une bonne histoire de Daredevil, ou si vous avez adoré le travail de Bendis sur le personnage, ou sur celui de Jessica Jones.